lundi 10 juillet 2017

Urban Operations: pousser du bois au lieu de pousser du plomb

Aujourd’hui, je vais vous parler d'un nouveau jeu qui s'est fait attendre mais qui le vaut bien, Urban Operations, édité par la société NUTS Publishing.

Urban Ops a pour ambition de simuler, de manière réaliste, des combats d'infanterie en environnement urbain. Ce qu'on appelle vulgairement du "combat loc", ou MOUT chez nos amis anglo-saxons.

Des fantassins progressent, protégés par un char Leclerc

La particularité de ce jeu est qu'il a été créé par un officier d'infanterie qui connaît plutôt bien le sujet puisqu'il  a été instructeur au CENZUB, le Centre d'Entraînement aux Actions en Zones Urbaines, où sont formées au combat urbain non seulement les unités de l'Armée française, mais également celles d'autres pays européens qui viennent s'y entraîner dans le cadre d'exercices communs.

Son créateur a tout d'abord pensé ce jeu comme un outil de simulation, à destination des unités militaires. Mais dans "serious game", il y a game... Je ne m'étendrai pas sur la genèse de ce jeu, je préfère vous inviter à lire l'interview de Sébastien de Peyret, le créateur de ce jeu, qui est disponible ici.




Autant le dire tout de suite, Urban Ops c'est du lourd, au sens propre comme au sens figuré !
Et on s'en rend compte dès l'ouverture de la boîte:
- 4 cartes de 72x54 cm
- 1 carte de 72x13cm
- 200 marqueurs
- un livre de règles
- 3 livres de campagne
- deux aides de jeu
- 16 scénarios jouables
- 160 pions en bois
- 144 cartes
- 2 dés à 10 faces

A première vue, on pourrait se plaindre que tout est en vrac dans la boîte et qu'on aurait pu caler tout ça, mais l'aspect positif de la chose, c'est qu'on peut l'arranger comme on souhaite.
Je sens que je vais me bidouiller quelque chose avec mon imprimante 3D...


Autre petit point noir, tous les documents sont édités en langue anglaise mais, ami lecteur, je t'invite à attendre quelques secondes avant de te rouler par terre de dépit en invoquant Jeanne d'Arc, Mers el Kébir et le dernier tournoi des 6 Nations. En effet, fier défenseur de la langue de Molière, sache que la version française est disponible sur le site de l'éditeur, aussi tu ne seras point forcé à te pervertir avec la langue barbare des anglois.

Thierry la France lui-même s'en trouve rassuré...
Une partie se joue sur une carte imprimée qui représente le théâtre des opérations.
Les livrets permettent de jouer 3 campagnes, à travers 16 scénarios:
- une campagne de type "cold war gone hot", qui relate d'hypothétiques combats entre l'OTAN et les forces du Pacte de Varsovie, dans la trouée de Fulda en 1985
- une campagne dédiée à Mogadiscio, avec l'incontournable scénario "black hawk down", un must have...
- une campagne nommée "the four aces" (les 4 as) qui permet de jouer 4 batailles icôniques: Falloujah (2004), Kolwezi (1978), Grozny (1999) et Bassorah (2003).




Il faut souligner la grande qualité de ces livrets, qui ne se contentent pas de livrer des scénarios mais qui présentent de manière relativement complète le contexte de chaque engagement.

Par ailleurs, chaque joueur dispose d'une fiche rappel contenant toutes les informations et les directives nécessaires pour la partie.

les aides de jeu du scénario "Kolwezi"
Les secteurs et les distances (de tir ou de déplacement) sont matérialisés grâce à des hexagones d'environ 15mm de côté. L'échelle choisie est particulièrement intéressante, puisqu'il est possible d'utiliser des figurines de 6 à 15mm si vous souhaitez donner du relief à vos parties. Personnellement, je pense tenter l'aventure avec mes figurines en 6mm...

Une des cartes, avec une feuille A4 pour donner une idée de l'échelle
Afin de simuler le "brouillard de guerre", terme qui désigne le fait qu'un chef ignore tout un tas de paramètres lorsqu'il est au combat (la nature et le volume de l'ennemi qu'il affronte, les intentions de ce dernier, le menu du soir, etc...), Urban Ops fait appel à une série de pions en bois de 2 couleurs différentes, une pour chaque camp.  Sur une face, se trouve une image qui permet de déterminer l'unité représentée par le pion. L'autre face est vierge. Ainsi, tant que le joueur n'a pas réussi à identifier l'unité ennemie, il ignore si celle-ci est un véhicule, des fantassin, ou simplement un leurre...

Avant de jouer, un retour en enfance s'impose afin de coller tous ces autocollants...

Une fois l'unité identifiée, vous pouvez vous reporter à la carte correspondante, qui comporte toutes les caractéristiques:
- le type de l'unité: blindés, infanterie, spécialistes, etc...
- sa puissance de feu
- les effets de l'arme
- la qualité de l'unité

Exemple d'une carte d'unité

Je ne vais pas entrer dans les détails de tous les mécanismes de jeu, mais sachez que malgré un système assez simple de prime abord, il est possible de modéliser une quantité phénoménale d'actions: créer et franchir une brèche, grimper sur un toit ou utiliser des égouts, faire appel à des appuis aériens ou de l'artillerie, lancer un assaut au corps à corps ou disperser un groupe de civils, etc...

La notion de Valeur Opérationnelle est un point qui mérite tout de même d'être souligné: cette fameuse "VO" définit la capacité globale de résistance d'une unité. Une perte de VO symbolise aussi bien que l'unité a subi des pertes (morts ou blessés), une baisse de moral ou encore que les combattants sont en état de choc, ou qu'ils ont gaspillé leurs munitions. Pour faire simple, la VO symbolise la capacité de l'unité à poursuivre le combat.

Or chaque unité possède 3 niveaux de VO (2 pour certaines unités comme les observateurs d'artillerie). Le positionnement du pion permet de représenter la VO de l'unité, comme l'indique le dessin suivant:


 Le niveau de VO évolue en fonction de plusieurs facteurs: les pertes subies, le soutien reçu, voire l'élimination d'une unité ennemie. Une unité faiblement opérationnelle qui voit sa VO diminuer une nouvelle fois est retirée du jeu: elle n'est plus en mesure de combattre, elle est neutralisée.

Si vous voulez en savoir plus sur les différentes mécaniques de jeu, je ne peux que vous inviter à regarder ces 2 vidéos de trictractv:
- vidéo nr.1: comment ça marche ?
- vidéo nr.2: une petite partie ?

Pour conclure, Urban Ops est un jeu qui mérite qu'on s'y attarde car il réussit le pari ô combien difficile d'être réaliste tout en utilisant une mécanique de jeu relativement simple et facile à prendre en main.
Je lui souhaite une belle carrière et espère qu'il saura séduire un large public.

RFA 1985, une compagnie de fusiliers motorisés sur BMP2 se lance à l'attaque...